L'évadé du clair de Lune

Chapitre 12 : Nouvelles pistes

4536 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 29/04/2024 10:35

Scrimgeour était penché sur la table de réunion dans la salle souterraine de la maison de Sirius et Sélène. Shacklebolt l’avait rejoint alors que les autres Aurors rassemblaient les différentes preuves. Il tourna sa tête de lion vers son collègue :

— Je ne comprends rien !! C’est quoi tout ça ? À quoi est-ce qu’elle jouait ? demanda-t-il en se redressant. T’as vu les photos des Potter sur la cheminée ?

— Pour quelqu’un qui est sensé les avoir trahis, elle semble avoir gardé les souvenirs heureux, c’est curieux.

— Et ce mur ! Regarde-moi ça ! Il y en a pour tous les goûts : des articles sur les Mangemorts présumés, sur Black, sur Dumbledore et j’en passe. Pourquoi accumulait-elle tout ça depuis tout ce temps ? Les plus vieux datent d’il y a quatre ans !

 

De mauvaise humeur, il jeta un des articles sur la table devant son collègue puis croisa les bras sur son torse :

— En plus, elle lisait minutieusement tous les journaux, elle a même remarqué l’encart concernant le vol dans les scellés, y a deux ans. C’est dingue, on avait pourtant étouffé l’affaire.

— On a toujours soupçonné les Mangemorts d’avoir fait le coup, répondit Shacklebolt en haussant les épaules.

 

Scrimgeour hocha la tête, pensif.

— Mais justement ! Si elle était Mangemort, pourquoi s’est-elle intéressée à ce vol ? Elle devait être au courant, non ? Pourquoi surveillait-elle tous ceux qui disent avoir été soumis à l’Imperium ? Bordel, j’arrive même plus à réfléchir !

 

Kingsley parcourait les différentes coupures de presse des yeux quand il repéra quelque chose :

— Cette photo… C’est la famille Weasley, précisa Kingsley en désignant l’article de la loterie.

— Tu les connais ?

— Oui, Arthur, le père, travaille au ministère au Service des Détournements de l’Artisanat Moldu.

— Qu’est-ce qu’ils ont avoir avec elle ? Tu penses qu'ils sont impliqués ?

 

Kingsley secoua la tête.

— J’en doute… Même s’ils sont sang-purs et affiliés à la maison Black, je connais bien Arthur. Les Weasley ont refusé de faire partie de la liste des « Vingt-huit Sacrés ». Lui et Malefoy se détestent, suffit de voir comme ils se dévisagent dans les couloirs du Ministère. Non, impossible qu’il soit Mangemort. Puis je te rappelle dans quel service il travaille ? Il adore les moldus, il les trouve très ingénieux. Et Molly, sa femme, était la sœur de Fabian et Gideon.

— Les Prewett ?

 

Shacklebolt confirma d’un signe de tête.

— Je n'ai jamais connu plus intègres qu’eux, poursuivit le grand Auror noir. Tués par des Mangemorts lors de la guerre. Molly était dévastée à leur enterrement. 

— Mmm…

— Je peux envoyer une convocation à Arthur si tu veux.

— Nan, j’irais chez eux demain matin. Une visite informelle pour commencer. On pourra toujours les convoquer plus tard si je sens que quelque chose n’est pas net.

 

Un des Aurors en faction à l’entrée de la maison arriva en courant :

— Black et Thorne ont été localisés square Grimmaurd à Londres, Monsieur. Il se sont barricadés dans la maison des Black. Pour le moment, toutes les nos tentatives pour entrer ont échoué. La maison est bardée de sortilèges anti-intrusion. Les collègues attendent les ordres et une solution !

— Nom d’une bouse de dragon ! Ça va être coton de les déloger de là tout en protégeant le Secret Magique, maugréa Scrimgeour. On arrive.

 

Sur ces mots, les deux Aurors en charge remontèrent et, une fois à l’extérieur, transplanèrent vers la capitale. Sur place, ils arrivèrent juste à temps pour voir un de leurs collègues traverser la place en volant, lui aussi expulsé par la porte d’entrée de la maison des Black.

— Je vois… grogna Rufus Scrimgeour. Arrêtez tout. Il faut isoler la place. Je vais contacter les services de police Moldus et tenter de leur pondre un mensonge crédible pour obtenir leur concours.

— Je me charge de trouver un conjureur de sorts pour lever toutes les malédictions sur cette porte, ajouta Kingsley avant de transplaner vers le ministère.

— Ça va être long, je pense qu’on n'arrivera à rien d’ici demain matin, grommela l’Auror blond.

— D’ici là, ils auront le temps de partir où ils veulent, ils ont un elfe de maison là-dedans… avoua l’agent en faction sur la place.

 

Scrimgeour jura.

 

 

OoooO

 

 

A l’intérieur de la maison, Sirius s’écarta de la fenêtre, prenant soin de ne pas se faire voir de ses assiégeants. Il se retourna et observa Sélène, dans son lit d’adolescent. Elle avait fini par s’assoupir, épuisée, après qu’il l’eut rassurée sur l’efficacité des maléfices anti-intrusion de son père. Il remonta le drap sur les épaules de la jeune femme et la regarda dormir.

 

Perdu dans ses pensées, il s'assit doucement au bord du lit, attentif à ne pas la réveiller et son regard se porta sur la fenêtre par laquelle il s’enfuyait des années auparavant pour aller la retrouver. Depuis le début de leur relation, il avait su, au fond de lui, qu'il n'y aurait jamais personne d'autre qu'elle. C'est sans doute cette certitude qui l'avait poussé à se faufiler hors de cette chambre et à risquer ainsi la fureur de ses parents. C’était même une raison supplémentaire d’aller la retrouver.

 

Durant l'été 1976, moins de deux semaines après leur retour chez eux pour les vacances, le miroir Double Sens ne leur avait finalement pas suffit. Ils s'étaient donné rendez-vous dans le Londres moldu et avaient passé ensemble une magnifique après-midi.

 

Elle s'était occupée de tout et l’avait entraîné dans des endroits dont il n’avait jamais imaginé l’existence. Il était rentré chez lui très tard ce jour-là et s’était fait prendre par sa mère. Il en avait été sévèrement puni mais il n’avait pas regretté.

 

La semaine suivante, il avait alors prudemment déjoué les entraves de sa génitrice, destinées à l’empêcher de sortir et avait réussi à la rejoindre. Il avait recommencé la semaine d'après puis celle encore après, veillant à ne pas rentrer trop tard pour ne plus se faire prendre. Il avait déjoué la surveillance de sa mère à chaque fois, et rien n'aurait pu lui enlever le sourire qu'il arborait, ce qui finit par mettre la puce à l’oreille de sa famille.

 

A la fin du mois de juillet, cet été-là, il avait enfin trouvé le courage d’embrasser la jeune fille. Ça avait été la première fois que lui, Sirius Black, avait eu peur d’être repoussé. Mais par bonheur, elle lui avait rendu son baiser. Il n’avait jamais été aussi heureux.

 

Cependant, cette fois-ci, sa mère avait été plus maligne et l’avait fait suivre discrètement par Kreattur qui avait fait son rapport à ses maîtres. Quand Sirius était rentré, son père l’attendait et l'avait sermonné, lui interdisant de revoir Sélène, lui apprenant qu'il avait été fiancé à Iphigénia Nott, une fille de bonne famille, selon les critères de ses parents. Il s’y était opposé, décrétant que jamais il n’épouserait quelqu’un d’autre que Sélène, peu importe son statut. Son père était entré dans une fureur monstre et l’avait battu jusqu’à lui casser plusieurs côtes, hurlant comme un dément que tant qu’il serait en vie, jamais il n’accepterait que son fils salisse le sang de sa famille.

 

Sirius avait encaissé, devant sa mère et son frère, fier et borné dans sa décision. Le lendemain, malgré la douleur atroce provoquée par chaque respiration, il s'était enfui de cette maison pour rejoindre James qui l'avait soigné et hébergé pour le reste de sa scolarité.

 

Sa chambre était restée telle qu’il l’avait laissée. Il soupira. Jamais il n'aurait pensé devoir séjourner à nouveau entre ces murs. Et jamais, il n'aurait imaginé voir un jour Sélène dans ce lit.

 

Il sourit en observant la jeune femme. Il l’aimait. Son intelligence, sa beauté, son espièglerie et son effronterie. Tout. Et il avait pleinement réalisé ses sentiments à la rentrée qui avait suivi, sur le quai de la gare.

 

Ils étaient arrivés ensemble, avec les parents de James, mais quand sur le quai Sirius avait repéré sa famille, accompagnant Regulus, puis les Nott, il avait discrètement lâché la main de Sélène, pour ne pas la mettre dans l’embarras ou lui attirer des ennuis. Mais Sélène avait à nouveau callé sa main dans la sienne en lui adressant son plus beau sourire, sûre d’elle, amoureuse. Le cœur de Sirius avait bondi dans sa poitrine et il lui avait souri en retour. Elle avait rougi légèrement puis ils avaient poursuivi leur chemin en passant devant les deux familles de sang-purs. Sélène avait resserré ses doigts autour de ceux de Sirius en sentant les regards méprisants de Orion et Walburga Black et s’était efforcée de regarder droit devant elle.

— Comment osez-vous, jeune fille, mon fils est fiancé avec quelqu’un de son rang ! avait sifflé la mère de Sirius. Gardez votre place !

— Mais je suis exactement là où je dois être, Madame. Sur ce quai, prête à monter dans ce train, avait répondu Sélène devant un Sirius admiratif.

James avait explosé de rire devant l'air outré de la génitrice de son meilleur ami qui avait alors enchaîné :

— Votre fils ? Il me semble pourtant, Mère, que vous aviez été claire quand je suis parti : vous ne me considérez plus comme votre fils et je suis déshérité. Ce sont vos dires, non ?

Les visages d’Orion et Walburga Black étaient devenus livides, Monsieur et Madame Nott verts de rage et, tandis que Sirius, Sélène et James s’éloignaient prendre place dans le Poudlard Express, ils avaient hurlé que les fiançailles entre Sirius et Iphigénia étaient rompues. Sirius avait aimé Sélène encore davantage ce jour-là.

 

Il reporta son regard sur la jeune femme endormie. Elle avait les sourcils froncés et semblait soucieuse, en proie à un cauchemar. Tendrement, il caressa son doux visage et cela sembla l’apaiser un peu. Il attendit quelques minutes puis se releva et sortit de la pièce. Il devait être presque minuit mais il ne trouvait pas le repos et ne voulait pas la réveiller en bougeant trop souvent, son sommeil était déjà trop fragile. Sur le seuil, après un moment d’hésitation, il se rendit dans la chambre voisine, celle de son frère.

 

Sur la porte, un petit écriteau portait une inscription écrite en lettres vertes soigneusement tracées : "Défense d'entrer sans l'autorisation expresse de Regulus Arcturus Black". Etrangement ému, Sirius posa la main sur la poignée de la porte. Verrouillée.

 

Il sortit sa baguette et murmura, la gorge serrée :

- Alohomora.

La porte s'ouvrit entièrement avec un petit déclic.

 

Sirius n'avança pas et garda les yeux braqués sur cette chambre ainsi révélée. La chambre de son petit frère. Cela faisait des années qu'il n'y était plus entré. Cela remontait à avant son entrée à Poudlard, son admission à Gryffondor, la fracture avec sa famille. Le cœur de Sirius se serra.

 

Il soupira et s'avança vers le bureau. La lueur de la lune éclairait faiblement la pièce. Il saisit une photo qui traînait là et se perdit dans la contemplation des joueurs de l'équipe de Serpentard. Regulus avait été tellement fier quand il avait été sélectionné en tant qu'attrapeur. Sur la photo, l'image de son jeune frère le regardait d'un air de défi, les bras croisés sur sa poitrine. Il sentit soudain ses yeux picoter. Une sensation depuis longtemps oubliée. Alors, brutalement, Sirius secoua la tête pour sortir de ses pensées et reposa la photo, avant de se reconcentrer sur ce qu’il était venu faire.

 

Il tira la chaise, s’installa au bureau et entreprit d’écrire deux lettres.

— Kreattur ! appela-t-il quand il eut fini.

 

Un crac sonore se fit entendre et l’elfe de maison se matérialisa devant lui.

— J’aurais besoin que tu cherches quelqu’un pour moi.

 

L’elfe de maison s’inclina devant lui.

— Kreattur fera de son mieux, mais il est tard, Maître.

— Je sais, celui que je cherche fait ses affaires la nuit. Je pense que tu le trouveras dans l’allée des Embrumes, sur le chemin de Traverse. Je veux que tu lui donnes cette lettre et que tu restes avec lui jusqu’à ce qu’il ait fait ce que je demande.

 

L’elfe s’inclina à nouveau devant lui. Sirius lui tendit la première lettre et poursuivit.

— S’il réussit à faire ce que je souhaite, je partirai avec Sélène. Il faut qu’il y parvienne avant le lever du soleil mais le plus tôt sera le mieux. Je ne sais pas combien de temps les maléfices de mon père vont tenir, mais tôt ou tard, les Aurors finiront par ouvrir cette porte. Quand ce sera le cas, tu iras trouver le professeur Dumbledore. Cette deuxième lettre est pour lui. J’espère que Remus a réussi à le gagner à notre cause et qu’il prendra soin de toi.

— Maître… commença Kreattur, une lueur de panique dans ses yeux globuleux.

— Je sais, tu n’as pas envie de quitter cette maison. Mais je te promets que ce n’est que temporaire. Je ne veux juste pas qu’il t’arrive quelque chose pendant mon absence. Alors, tu iras à Poudlard, Kreattur !

— Kreattur fera comme le maître veut, finit par dire l’elfe de maison en rangeant les deux lettres dans une des poches de son horrible vêtement.

 

Sirius sourit, satisfait.

— Maintenant va, celui que tu cherches s’appelle Mondigus Fletcher.

 

Kreattur s’inclina une dernière fois et disparut dans un craquement sonore. Sirius soupira et se retourna vers le bureau. Si un jour quelqu’un lui avait dit que sa vie reposerait entre les mains de son elfe de maison et qu’il aurait des relations cordiales avec lui, il l’aurait accusé d’abuser de Whisky Pur Feu.

 

Il s’affaissa alors au fond du fauteuil et ses yeux se posèrent à nouveau sur la photo de l’équipe de Quidditch de Serpentard. Machinalement, il l'observa à nouveau et son regard se porta sur son frère qui le défiait du même air hautain que lui-même arborait parfois. Ses cheveux bruns, plus courts que les siens, semblaient voler au vent qu’il faisait ce jour-là.

— Quel gâchis… Tu aurais dû venir me parler… murmura Sirius, avant d’ajouter, plus bas encore : mais je t’aurais sans doute rejeté, à l’époque. Comme je regrette, petit frère…

 

Il renifla et reposa la photo face contre la table de travail pour ne plus la voir. Machinalement encore, il saisit un petit carnet poussiéreux qui traînait là et entreprit de le feuilleter. Il reconnaissait l’écriture appliquée de son frère, bien plus sérieux et studieux que lui-même ne l’avait été. Un journal intime. Jamais il n’aurait imaginé son frère écrire ce genre de choses. Il l’ouvrit à la première page et commença la lecture, intrigué :

 

« Je sais que je ne serai plus de ce monde bien avant que quelqu’un puisse lire ceci mais je veux que vous sachiez que c’est moi qui ai découvert le secret du Seigneur de Ténèbres.

 Je vais voler un de ses précieux Horcruxes et j’ai l’intention de le détruire dès que je le pourrais.

J’affronte la mort dans l’espoir que lorsqu’il rencontrera un adversaire à sa taille, il sera redevenu mortel.

R.A.B. » *

 

— Nom d’une gargouille, Regulus… murmura Sirius, la voix tremblante d’émotions contenues.

 

 

OoooO

 

 

Tôt, le lendemain matin

 

Sirius s'était endormi au bureau de son frère, le journal dans les mains. Sélène l'observait, attendrie, sur le pas de la porte. Elle avait mal dormi mais avait cependant les idées plus claires que la veille. Elle s'approcha doucement dans le dos du jeune homme, l'entoura de ses bras et lui embrassa la nuque.

 

Sirius sursauta puis sourit, collant sa joue contre la tête de la jeune femme.

— Bonjour toi, marmonna-t-il, la bouche un peu pâteuse à cause du manque de sommeil.

— Bonjour, répondit-elle en se redressant. J'ai eu peur ce matin en ne te trouvant pas à côté de moi.

 

Sirius s'étira, le dos endolori. Il avait dormi à la dure sur une paillasse trop fine pendant des années mais son corps en avait déjà perdu l’habitude alors qu'il n'avait passé que deux nuits dans un bon lit. Il grogna. 

— Je ne réussissais pas à dormir, j'ai surveillé les Aurors dehors pendant quelques temps et quand ils ont arrêté de s'acharner contre la porte, je suis venu ici et j'en ai profité pour écrire une lettre. J'ai envoyé Kreattur la porter à son destinataire.

— A qui écris-tu en pleine nuit ?

— Tu te souviens de Mondigus ?

— Fletcher ?

 

Sirius se leva et hocha la tête. Il glissa le journal de son frère dans une de ses poches, alla jeter un regard à la fenêtre et grogna à nouveau en faisant une grimace. Les Aurors avaient réussi à obtenir le concours de la police de la ville. La place avait été bouclée et les conjureurs de sorts attendaient déjà les ordres au pied des marches. L'assaut allait être donné, ils n'avaient plus beaucoup de temps.

 

Il se retourna vers Sélène.

— Ca s'agite dehors.

 

La jeune femme hocha la tête.

— J'ai vu ça en me levant. On peut déjà être reconnaissants d'avoir eu une nuit plutôt tranquille. Merci le Secret Magique.

 

Sirius hocha la tête sombrement. Sélène avait raison, les enchantements de son père avaient tenu les Aurors en échec pour le moment mais Sirius savait que ce n’était que temporaire. Ce n'était plus qu'une question de temps. Il s’avança pour sortir de la pièce et fit signe à Sélène de le suivre. Ensemble, ils descendirent pour aller dans la cuisine vérifier si Kreattur était rentré.

— Et donc, tu attends quoi de Mondigus ?

— Je lui ai demandé de nous trouver un moyen de quitter le pays.

— Sirius ! s'exclama sa compagne. On ne peut pas fuir, on a d'autres Horcruxes à trouver.

— Partir nous permettra de nous éloigner de la traque que les Aurors et les Mangemorts ont lancée contre nous. On reviendra plus tard mais pour le moment, on ne peut pas rester ici.

 

Arrivés aux pieds des escaliers, ils entendirent une déflagration, étouffée, qui appuya ses propos. Ils s'arrêtèrent et lancèrent un regard inquiet vers la porte.

— Kreattur ne doit pas traîner, ça devient urgent, dit Sirius les sourcils froncés. 

 

Ils descendirent jusqu’au sous-sol et entrèrent dans la cuisine. L'elfe de maison n'était pas là.

— Connaissant mon père et l'acharnement qu'il a mis à protéger cette maison, ça devrait leur prendre encore un moment. Je pense qu'on peut s'autoriser à manger quelque chose.

 

Sélène grimaça en lançant un regard vers le rez-de-chaussée.

— J'ai l'estomac noué, je ne sais pas si je vais pouvoir avaler quoi que ce soit.

— Pourtant, il va falloir te forcer. On va partir en cavale, ma puce, c'est probablement le dernier repas consistant qu'on va pouvoir faire avant un moment.

 

D'un coup de baguette magique, Sirius mit de l'eau à chauffer et toasta des tranches de pain. Sélène soupira et entreprit de faire cuire des œufs et du bacon. En deux minutes, ils furent attablés et avaient commencé à manger.

 

La Gazette du Sorcier avait été livrée par hibou et relatait rapidement l’attaque de leur maison des bois la veille. La une faisait état d'un complice qui avait disparu. Le couple soupira, l’identité de Sélène avait certes été révélée mais au moins celle de Remus était préservée.

 

— Sais-tu où il est allé ? s'inquiéta la jeune femme.

 

Sirius hocha la tête, sans oser lever le regard du journal. Il hésita un instant.

— Il est allé voir Dumbledore avec le médaillon et j'ai approuvé son idée, finit-il par avouer en reportant son attention sur elle.

 

La jeune femme se figea. Il vit sa mâchoire se contracter. Une autre explosion se fit entendre au rez-de-chaussée. Ils tournèrent la tête vers la porte, puis comme la jeune femme ne parlait toujours pas, Sirius voulu lui expliquer son raisonnement.

— Sélène, commença-t-il en reposant le quotidien, je sais ce que tu ressens pour lui et je t'assure que je te soutiendrais toujours, mais…

— Mais il n'y avait rien d'autre à faire. J'en suis consciente, poursuivit la jeune femme en se relevant pour aller mettre son assiette dans l'évier.

 

Elle se retourna vers son compagnon et croisa les bras sur la poitrine. Elle n'osait pas le regarder.

— Je ne suis pas idiote, Sirius, je sais bien que la rancœur que j'ai envers lui est parfaitement irrationnelle. Il n'avait aucune preuve en notre faveur et il ne pouvait pas savoir. Mais c'était plus fort que moi, j'avais besoin de rejeter la faute sur quelqu'un.

 

Sirius se leva à son tour pour la rejoindre et la prendre dans ses bras.

— J'aurais dû aller le trouver bien plus tôt, continua-t-elle en entourant la taille de son homme. Remus essayait sans cesse de m'en convaincre, mais je n'arrivais pas à m'y résoudre. J'étais prisonnière de ma colère. T'en avoir parlé, que tu m'aies acceptée avec ces cicatrices, ça m'a libérée de ce poids et j'ai honte d'avoir réagi ainsi.

 

Elle se serra davantage contre lui.

— J'espère juste qu'il n'est pas trop tard et que je n'ai pas gâché toutes nos chances.

 

Il caressa ses cheveux de sa main.

— On va y arriver, il n'est pas trop tard. Et Dumbledore va sans doute réussir à détruire l'Horcruxe qu'on lui a apporté.

— Mais on ne sait même pas combien il en a créé ! Le médaillon pourrait être seul, tout comme il pourrait en avoir fabriqué une dizaine. Et à ce moment-là, même détruit… 

 

Sirius entendit la respiration de la jeune femme s'accélérer. Il sentait son cœur battre fort contre lui. Il entendait sa voix de plus en plus aiguë. Il sentait les mains de la jeune femme trembler légèrement, accrochées à son vêtement dans son dos. Il resserra son étreinte et lui murmura d'une voix douce :

— J'ai trouvé le journal de mon frère. Il l'a commencé peu de temps avant sa mort, quand il a compris ce que Voldemort avait fait. Regulus y a écrit tout ce qu'il a appris. On y trouvera peut-être quelques informations. Et sinon, essayons de refaire confiance à Dumbledore, au moins sur ce point-là, d'accord ? Maintenant qu'on l'a mis au courant, il trouvera peut-être combien de ces choses Voldemort a créé. Ce n'est plus seulement entre nos mains maintenant, d'accord ? Nous ne sommes plus seuls !

 

Contre son torse, Sélène acquiesça et le serra encore. Ils restèrent quelques instants dans cette position, puis se détachèrent quand Kreattur se matérialisa enfin dans la cuisine. L'elfe de maison apportait avec lui une vielle selle de vélo et tendit une lettre à Sirius en s'inclinant devant lui.

— Maître, couina-t-il.

 

Ils lurent ensemble la réponse de Mondigus.

— Un Portoloin… Il a réussi ! Merci Kreattur, tu as bien travaillé, se réjouit Sirius alors que son elfe s'inclinait encore davantage devant lui, son nez en forme de groin touchant presque le sol.

 

Sirius leva la tête vers l'horloge de la cuisine qui affichait cinq heures et cinquante-huit minutes.

— On a deux minutes avant le départ, souffla-t-il. 

 

Rapidement, Sélène sorti alors sa baguette et lança un sortilège d'Attraction pour faire venir leur sac de voyage et le confia à Sirius. Celui-ci attrapa un bout de parchemin et une plume et écrivit rapidement un mot qu'il confia à son elfe de maison :

— N'oublie pas ce que je t'ai dit cette nuit, Kreattur. Et donne ce mot à Remus. Je viendrai te chercher à mon retour.

 

L'elfe de maison acquiesça en se relevant.

Plus qu'une minute avant le départ.

 

Les coups à la porte d'entrée se faisaient de plus en plus forts. Les conjureurs de sorts avaient dû venir à bout des maléfices de son père.

Sirius tourna la tête vers Kreattur qui, sur un signe de son maître, disparut dans un crac sonore. Sirius regarda Sélène et ils saisirent la vieille selle de vélo.

— Où allons-nous ?

 

Sirius allait lui répondre quand des voix leur parvinrent du rez-de-chaussée. Les Aurors étaient entrés dans la maison. Les deux fugitifs se regardèrent, anxieux. Ils lancèrent un coup d’œil à l'horloge de la cuisine et virent l'aiguille des secondes se déplacer avec une lenteur qui les mettait au supplice. Les bruits de pas se rapprochaient.

 

Puis, enfin, le carillon sonna six heures. Aussitôt, ils eurent tous les deux l'impression qu'un crochet les avait saisis au niveau du nombril pour les entraîner dans un tourbillon. Ils serrèrent de toutes leurs forces la selle de vélo et, en quelques minutes, furent transportés vers leur destination. Les jurons de frustration des Aurors qui venaient d'entrer dans la cuisine résonnèrent à leurs oreilles.

 

*Inspiré du tome 7 de HP


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